Quel chauffage pour être résilient ?

13 octobre 2010

En cette époque de grands travaux de rénovation des logements en France, le choix du système de chauffage est souvent l’objet de longues discussions et débats. Entre le type d’énergie, le coût d’investissement, le coût du combustible, le rendement énergétique, la durée de vie, les problèmes de maintenance et d’entretien ou la configuration du logement … nombreux sont les critères de choix qui peuvent orienter vers une solution plutôt qu’une autre.

Je vais proposer cette fois une évaluation en fonction de critères de résilience, c'est-à-dire en se demandant quelle est la capacité du système de chauffage à remplir son rôle dans des contextes économique et énergétique fragiles.

 

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Diversité

De la même manière qu’il est dangereux d’avoir 95% de nos transports qui dépendent du pétrole, il est risqué d’avoir un seul outil de chauffage chez soi. Avoir au moins un chauffage d’appoint utilisant une autre source d’énergie peut donc être pertinent. En effet, personne n’est totalement à l’abri d’une tempête qui provoquerait une rupture de ligne à haute tension, d’une grève des raffineries pétrolières ou encore d’un problème d’approvisionnement gazier.

Il ne s’agit pas de mettre trois puissantes chaudières, ce qui serait trop coûteux et excessif, mais d’avoir au moins la possibilité de chauffer une partie du logement si nécessaire.

Par exemple, si vous disposez uniquement de convecteurs électriques et que vous n’avez pas de cheminée, vous pourriez investir dans un petit poêle à gaz ou à pétrole (idéalement modifié pour fonctionner à l’huile de friture !). A l’inverse, si vous avez une chaudière à fioul, posséder un poêle à bois ou un radiateur électrique à bain d’huile serait bienvenu en cas de besoin.

 

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Stockage

La réserve ou le stock est un autre critère important de la résilience. En effet, celui-ci permet d’avoir le temps d’envisager des solutions de remplacement en cas de problème.

Tous les systèmes de chauffage électrique n’ont aucune capacité de stockage (pompe à chaleur, convecteur, panneau rayonnant électrique…) contrairement aux systèmes à  combustion qui sont généralement associés à une citerne (fioul et gaz hors réseau), des bidons de pétrole ou bouteilles de gaz, un silo ou des sacs (granulés), un tas de bûches (bois).

 

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Les systèmes solaires thermiques ont également une capacité de stockage très limitée (réserve d’eau chaude). Un tel système, s’il est bien dimensionné, est généralement très fiable, autosuffisant grâce au rayonnement solaire  et demande peu de maintenance. Par contre, le système peut s’avérer coûteux au départ et parfois peu efficace en cas de période nuageuse et froide prolongée.

 

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Vous pouvez également envisager de coupler un système photovoltaïque à une pompe à chaleur, ce qui permet d’obtenir un système électrique autonome mais dont la durabilité et la maintenance pourraient poser des problèmes dans le temps.

Fiabilité et maintenance

Dans un contexte économique stable, les compétences et le matériel nécessaires pour entretenir un système de chauffage sont généralement disponibles, même s’il faut les faire venir de très loin. C’est pourquoi certains outils, afin d’afficher de bonnes performances énergétiques deviennent de plus en plus complexes, délicats, fragiles et coûteux.

Vous aurez compris que je parle, par exemple, de la pompe à chaleur qui n’est, ni plus ni moins, qu’un chauffage électrique particulièrement efficace. Dans ce système, c’est généralement le compresseur qui peut poser des problèmes. En effet, si la durée de vie de l’ensemble est estimée à 15-20 ans, le compresseur peut tomber en panne bien plus tôt,  surtout s’il n’est pas entretenu et vérifié régulièrement. C’est pourquoi des compétences très spécifiques et des pièces de haute technologie seront toujours nécessaires pour ce système.

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A l’inverse, pour ceux qui disposent d’un conduit de fumée et d’une possibilité de stocker le bois, un outil comme le poêle de masse est prévu pour durer plusieurs décennies car il s’agit de technologies rustiques et très efficaces. Ainsi vous obtenez des rendements thermiques compris entre 75 et 90% grâce à l’excellente combustion, vous pouvez généralement l’utiliser comme four pour la cuisine et parfois même chauffer l’eau sanitaire.

Le combustible

Aujourd’hui, toutes les sources d’énergie sont disponibles et aucune d’entre elles n’est encore prohibitive. C’est pourquoi il est encore possible de trouver, sur le marché, des technologies qui permettent d’utiliser la plupart des combustibles. Dans une recherche de résilience, elles ne sont pourtant pas toutes à égalité.

Dans une perspective de pic pétrolier, la chaudière à fioul ou à mazout est à proscrire puisque les coûts vont très fortement augmenter et que l’approvisionnement en combustible pourrait être incertain à l’avenir.

J’aurais tendance à dire qu’il en va de même pour toutes les énergies fossiles qui ne sont pas disponibles en quantités suffisantes sur notre territoire. Les chaudières à gaz naturel présentent aujourd’hui d’excellents rendements thermiques et permettent de limiter la facture de chauffage.

Malheureusement, le prix du gaz est directement indexé sur celui du pétrole et, en France, la quasi-totalité est importée. Là encore, la perspective du pic pétrolier doit alerter sur la possible évolution des coûts du gaz, surtout si celui-ci est utilisé par les pays producteurs pour fabriquer du carburant liquide.

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Restent la géothermie, le solaire et la biomasse pour chauffer durablement votre logement avec un risque limité de rupture d’approvisionnement.

La géothermie, sauf si vous habitez au dessus d’une source d’eau chaude, est forcément couplée à une pompe à chaleur (PAC).

Il faut bien faire attention à ce qu’on appelle coefficient de performance (COP). Cette valeur tourne autour de 3 pour les pompes à chaleur, c'est-à-dire 3 kWh de chaleur produite pour 1 kWh d’énergie électrique consommée.

Si vous ne produisez pas votre propre électricité à l’aide d’une éolienne ou de modules photovoltaïques, votre PAC sera alimentée par les centrales nucléaires et par des centrales à fioul en périodes de pointes hivernales. Or, le rendement de production et de distribution électrique en France est d’environ 30%.

Autrement dit, il faut 3 kWh de chaleur nucléaire pour produire 1 kWh d’électricité, qui permettra de produire chez vous 3 kWh de chaleur ! On peut se demander l’intérêt d’une telle mise en œuvre (centrales nucléaires, lignes à haute, moyenne et basse tension, installation géothermique et pompe à chaleur) pour obtenir l’efficacité d’une bonne chaudière à granulés !

 

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Le solaire thermique ainsi que l’électricité renouvelable (photovoltaïque, hydroélectrique ou éolien) couplé à une PAC peuvent être également de bons compromis. L’efficacité et la rentabilité de tels systèmes dépendront évidemment de votre situation géographique, de la possibilité d’installer une grande surface de modules une éolienne ou une pico-centrale hydroélectrique.

Il y a enfin la biomasse, avec les énormes progrès réalisés dans les rendements de combustion, les utilisations et l’adaptabilité.

La chaudière à granulés présentent aujourd’hui les meilleurs rendements thermiques (jusqu'à 95%). Cependant elles nécessitent une source électrique constante pour alimenter le brûleur grâce à une vis sans fin. Il est possible de sécuriser cette alimentation par un panneau solaire, associé à une batterie et un onduleur, par exemple.

 

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Par ailleurs, même si vous disposez de bois à proximité ou sur votre terrain, les granulés ne peuvent pas être fabriqués à domicile car les machines sont très coûteuses et l’énergie nécessaire pour sécher la biomasse et la comprimer est très importante. C’est pourquoi vous dépendez forcément d’une usine de production.

Les chauffages au bois bûche sont également très performant et fiable aujourd’hui. Ils présentent l’avantage de ne pas être complexes et donc facilement réparables si besoin.

La cheminée à foyer ouvert est à proscrire tant elle est inefficace. Les inserts ou autres poêles sans accumulation de chaleur sont peu chers, mais l'utilisation est plus fastidieuse et inconfortable puisqu’il faut les recharger en permanence pour éviter le refroidissement du logement.

Le foyer de masse (ou poêle de masse) est un excellent outil, parfois coûteux mais très fiable, durable et performant. Son utilisation est simplifiée car il suffit d’une seule flambée par 24h pour maintenir une température agréable dans le logement. Par contre il peut prendre de la place suivant le type de poêle et impose un chargement manuel, comme tous les chauffages au bois bûche.

 

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La chaudière à granulés-bois bûche est un autre compromis. Cette chaudière mixte permet donc d’avoir une alimentation continue et régulée avec des granulés si vous en avez, et en cas de problème d’approvisionnement, elle permettra également de fonctionner avec de simples bûches que vous pourrez trouver plus facilement.


Conclusion

Se chauffer fait parti des besoins essentiels de l’humain. C’est pourquoi il est important de faire le bon choix en fonction de ses priorités. Je n’ai pas trop abordé le problème du coût car l’objectif de l’article était de comparer les systèmes sous l’angle de la résilience.

Pour résumer, je conseillerais de s’orienter vers un chauffage simple et facilement réparable, dont l’approvisionnement en combustible/énergie ne risque pas d’être remis en cause et j’inciterais également à posséder un minimum de réserve ainsi qu’à prévoir un chauffage d’appoint utilisant une énergie différente.

Il vous reste à choisir en fonction de la configuration du logement, de votre budget, de votre volonté d’avoir une alimentation automatique ou non et du volume de stockage dont vous disposez.

Enfin, on ne le répètera jamais assez, mais tous ces conseils ne serviraient à rien si vous n’avez pas d’abord isolé votre logement correctement.


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